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Queer & Rap, Reggaeton : La révolution à Puerto Rico ?

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Queer & Rap, Reggaeton : La révolution à Puerto Rico ? Il serait préjudiciable de faire des généralités, mais la révolution “Queer” n’a jamais eu lieu dans le rap français et dans le rap en général, déclare-t-elle. Au début des années 2000, dans le titre “On fait les choses”, un classique absolu du rap français, Rohff laisse échapper sa haine homophobe : “Mais on m’a dit que c’était des ‘pédés‘ qu’ils produisaient / Donc en tant qu’anti-pédé, ton colon je viens briser”. Kery James, alors leader du groupe Ideal J, faisait écho à cela dans son titre le plus provocateur des années 90, “Hardcore, comme deux pédés qui s’embrassent en plein Paris“. Quelques années plus tard, alors qu’il a rejoint “les hommes de raison“, Kery James autocensure le couplet lorsqu’il réinterprète son morceau sur scène.

Queer & Rap, Reggaeton: Une révolution manquée !

Mais les choses ont-elles vraiment changé en 20 ans ? Alors que la révolution #Metoo a du mal à se faire une place dans le rap français avec quelques porte-paroles tels que Vin’s ou Chila, et que certains rappeurs ont été accusés à tort ou à raison de violences conjugales (si le tueur du petit Nahel a droit à la présomption d’innocence, ces rappeurs aussi), qu’en est-il de la révolution Queer ? Eddy de Pretto, qui intègre quelques codes du “Hip Hop” dans ses morceaux, a été complètement ignoré par la presse rap.

Cependant, à Porto Rico, la génération “Queer” prend définitivement le pouvoir sous les traits de rappeuses lesbiennes et trans. Quelque chose d’impensable dans un pays largement chrétien que l’impérialisme américain irrigue de toutes ses forces. Villano Antillano, Young Miko et RaiNo représentent cette génération.

Queer & Rap, Reggaeton : La scène de Porto Rico !

Villano Antillano est sans aucun doute l’une des rappeuses les plus subversives de Porto Rico. Récemment, elle a enregistré un featuring avec Young Miko, réalisant ainsi la première collaboration entre une artiste trans et une artiste lesbienne. Et ce titre, sorti il y a plus d’un an, réalise près de 9 millions de vues. Les deux femmes ont été interviewées par le très prestigieux magazine Pitchfork pour un article qui leur était consacré.

À 17 ans, Villana est mise à la porte de chez elle. C’est une situation banale, voire une fatalité, pour de nombreux adolescents qui font leur coming-out. Elle parvient à survivre avec trois emplois, dont celui de travailleuse du sexe, ainsi qu’avec le soutien solidaire de la communauté queer. Elle confie à Pitchfork : “Il y a beaucoup de colère quit’envahit en grandissant en tant que personne en dehors du spectre de la cis hétéronormativité“, explique-t-elle. “Depuis que j’étais petite fille, j’ai toujours ressenti cette rancœur. Comme si je me demandais : ‘Pourquoi est-ce que personne ne m’aime tel(le) que je suis ?’

Mais elle ne considère pas sa transsexualité comme quelque chose d’exceptionnel : “Cela n’est pas nouveau, et des femmes comme moi ont certainement existé depuis le début de l’humanité“, dit-elle. “Je suis une artiste parmi un mouvement gigantesque“.

Son premier album, “La Sustancia X“, raconte précisément sa transition. Elle consacre également l’un de ses titres aux violences faites aux femmes dans un pays réputé machiste et misogyne.

Une histoire similaire pour Young Miko. Elle a connu une adolescence désastreuse, comme elle le laisse entendre elle-même : “Ils m’ont emmenée à l’église ; ils m’ont emmenée chez des thérapeutes ; ils m’ont retirée de l’école“. Contrairement aux idées reçues, cette non-acceptation de l’homosexualité n’est pas réservée aux pays en voie de développement. Aux États-Unis, la réalisatrice américano-iranienne Desiree Akhavan a mis l’accent sur les “camps de transformation” censés convertir des homosexuels à l’hétérosexualité dans le film “Come as you are“, primé à Sundance.

Son premier EP, “Trap Kitty“, raconte l’histoire d’une strip-teaseuse, l’une de ses amies. Son originalité, son récit et son talent lui ont permis de sortir de l’anonymat et de devenir une star aujourd’hui.

Elle conclut sur cette collaboration avec son homologue : “Nous vivons dans un monde machiste, et le genre urbano est principalement composé d’hommes“, dit-elle. “Mais j’ai un groupe de personnes qui me soutiennent et m’aiment pour ce que je suis“. “Vendetta“, sa chanson avec Villano, a permis à Miko de prendre conscience de toute l’importance de son influence ; elle pense que c’est la première fois qu’une rappeuse ouvertement lesbienne et une femme trans de Porto Rico collaborent sur une chanson de trap. “Tu pouvais marcher dans les rues de Porto Rico et l’entendre dans les voitures, dans les clubs. C’est ainsi que j’ai réalisé que nous faisions l’histoire“..

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